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Une chèvrerie en bois

Cyril Charlot et Romain Charcellay ont construit une nouvelle chèvrerie. Ils ont agrandi la taille de leur cheptel et livrent désormais du lait à la fromagerie Cloche d’Or.

En ce début de mois de juillet, il fait chaud à St-Maure-de-Touraine. S’il est encore trop tôt pour parler de canicule, le thermomètre s’emballe déjà. Ces fortes températures pourraient générer un stress thermique au sein de la chèvrerie. Eh bien ! pas du tout.  Pour trouver de la fraîcheur, les chèvres s’abritent dans le bâtiment. La chèvrerie en bois mesure 1 200 m² pour 350 places. Le cheptel est scindé en quatre lots répartis sur quatre aires paillées avec deux couloirs d’alimentation. Pour favoriser l’aération naturelle, deux bâtiments bipentes de 16 m de large ont été accolés. Il y a quelques années, l’option de construire un seul bipente de 32 m de large aurait sans doute été retenue. Pour les éleveurs, en quête de confort thermique, le temps des cathédrales est révolu. Une hauteur de charpente élevée génère des masses d’air trop importantes avec à la clé de graves problèmes d’aération. Entre les deux constructions, nous retrouvons un léger décroché de couverture favorisant l’aération. Les deux couloirs d’alimentation permettent à la fois de pailler et de distribuer la ration à base d’herbe enrubannée, de foin de luzerne, d’ensilage de maïs et de pulpe de maïs. « Cela fait un peu plus d’un an que notre bâtiment est sorti de terre et l’an dernier nous n’avons connu aucune chute de production. Nous avons fait confiance au constructeur, expérimenté dans la construction de chèvreries et le résultat nous convient. En période de forte chaleur, nous ouvrons le plus possible les bâtiments et au final, il n’y a qu’un toit pour protéger le cheptel des rayons du soleil », explique Cyril qui, avec son associé, a investi 110 000 € dans la chèvrerie.

DÉVELOPPEMENT DE LA PRODUCTION

Les éleveurs transforment eux-même une grande partie de la production laitière. Ils constatent ainsi très rapidement toute modification dans la production ou la fromageabilité. Or, depuis 2019, ils n’ont pas connu de changement notoire.  L’absence d’odeur d’ammoniac dans le bâtiment témoigne de sa bonne aération, qui a d’ailleurs été confirmée par le test du fumigène (permettant de calculer la vitesse d’évacuation de l’air). Dans ce projet, le choix du bois, porteur d’une image plus naturelle, s’est avéré évident car les clients viennent chaque jour à la ferme pour acheter des produits laitiers et n’hésitent pas à aller voir les chèvres.

L’agrandissement du cheptel de 144 chèvres à 352 mères a constitué l’élément déclencheur de la construction de la nouvelle chèvrerie. « Auparavant, nous transformions la totalité de notre production en fromages AOP Sainte-Maure de Touraine, en faisselle et autres produits laitiers. Pour sécuriser notre revenu, nous avons choisi de produire plus de lait pour vendre une partie de notre lait au fromager locale La Cloche d’Or. Aujourd’hui, nous transformons dans notre fromagerie la production de 200 chèvres. Le reste est collecté par notre partenaire. Les produits laitiers de l’EARL et notamment les fromages AOP Sainte-Maure de Touraine sont écoulés au magasin à la ferme, via le réseau la Ruche qui dit Oui ou encore sur les marchés locaux via un revendeur. » À long terme, Cyril craint un durcissement des normes sanitaires pouvant freiner, voire empêcher la transformation fermière. Pour sécuriser l’avenir de l’exploitation, il a préféré opter pour cet agrandissement.

Erwan Le Duc

EN CHIFFRES…

L’EARL DE LA HAUTE PILTIÈRE (INDRE-ET-LOIRE)

  • deux associés (Romain Charcellay & Cyril Charlot), une salariée à temps plein et un salarié à mi-temps ;
  • un cheptel de 352 chèvres, produisant en moyenne 1 000 kg par lactation avec un TB de 38,2 g/l et un TP de 34,1 g/l (moyenne des 12 derniers mois au contrôle laitier);
  • une alimentation respectant le cahier des charges du Sainte-Maure de Touraine (sans OGM et 80 % des fourrages produits dans la zone de l’AOP) ; 
  • la ration comporte 450 kg d’enrubannée, 350 kg de foin de luzerne, 400 kg d’ensilage de maïs et 375 kg de pulpe de maïs plus des minéraux ;
  • l’insémination artificielle représente 25 % des mises bas ;
  • 64 chèvres étaient en lactation longue lors du dernier contrôle laitier ;
  • une surface agricole utile de 95 ha dont 24 ha de céréales, 19 ha de maïs, 14 ha de sorgho grain, 14 ha de tournesol et 24 ha pour la production fourragère.

« BÂTIR DES CHÈVRERIES RENTABLES »

« UN BÂTIMENT D’ÉLEVAGE DOIT ÊTRE RENTABLE À SAVOIR QU’IL DOIT ASSURER LE BIEN-ÊTRE ANIMAL, LE CONFORT DE L’ÉLEVEUR ET ASSURER UNE BONNE PRODUCTIVITÉ DU TRAVAIL » , EXPLIQUE RICHARD PIGEON, DIRECTEUR COMMERCIAL DE L’ENTREPRISE ROINÉ.

 

Installée dans l’Ille-et-Vilaine, la société Roiné a été créée en 1936. Depuis les années 1980, elle s’est spécialisée dans les bâtiments agricoles et les fermes équestres. Richard Pigeon, son directeur commercial, nous explique les principaux éléments pour garantir la fonctionnalité d’un bâtiment d’élevage. Son entreprise dispose d’une solide expertise dans le domaine et construit une trentaine de chèvreries par an.

« Un bâtiment d’élevage doit être rentable à savoir qu’il doit assurer le bien-être animal, le confort de l’éleveur et assurer une bonne productivité du travail, explique Richard Pigeon, directeur commercial de l’entreprise bretonne. La construction d’une chèvrerie nécessite la prise en compte de la zone géographique d’implantation, ainsi que du type de conduite d’élevage, à savoir si les chèvres restent dans le bâtiment toute l’année ou non. Nous devons également tenir compte du bâti existant. La notion de vents dominants est moins prégnante qu’au préalable. La lecture de la rose des vents effectuée à divers endroits en France a permis de constater au fil des ans une évolution de l’orientation des vents dominants et de leur fréquence d’apparition. Avec le réchauffement climatique, certains territoires enregistrent des périodes pendant lesquelles les vents soufflent du sud sur plusieurs jours. D’ailleurs, nous le voyons bien, hors zone de Montagne, la protection des cheptels contre le froid est remplacée par la lutte contre le stress thermique. Les températures au-dessus de 30 °C ne sont plus exceptionnelles. Ici, sur l’élevage de Cyril Charlot, nous sommes en Indre-et-Loire et le stress thermique constitue une vraie préoccupation. Nous avons construit deux bâtiments accolés de 16 m. Nous aurions pu bâtir une cathédrale de 32 m mais les volumes d’air auraient été trop importants. » De manière générale, il faut privilégier une hauteur sur charpente la plus basse possible. Lorsque le volume d’air est trop important, l’air circule mal avec des problèmes d’odeur et de pont thermique. Pour la luminosité, les dômes translucides implantés au centre de la charpente sont à proscrire, tout comme les tôles de toit translucides. En été et parfois au printemps, ces aménagements coûteux génèrent trop de chaleur. « L’isolation des tôles constitue à nos yeux une bonne option et s’avère un vecteur de rentabilité. Ici, pour la chèvrerie de Cyril, elle représente une somme de 20 000 €, investissement qu’il faut ramener à la durée de vie d’un bâtiment. Sur les côtés, nous préconisons l’installation de filets brise-vent et de bardages en bois. Tous ces éléments doivent être amovibles pour assurer une ouverture maximale en période de canicule. L’idéal est alors de disposer d’un bâtiment protégeant les animaux des rayons du soleil, une sorte de parasol géant ! »

La société Roiné mise sur une charpente triangulée traditionnelle et n’a pas recours au lamellé-collé. Le bois provient d’Allemagne ou du Massif central. Pour la charpente, l’entreprise utilise du Douglas classé C24 (norme de résistance mécanique) avec des fermes en épicéa classé C30.

« Enfin, pour la notion de productivité du travail, il faut faire attention au positionnement des poteaux, ainsi qu’aux largeurs des couloirs. L’éleveur mise ici sur une mélangeuse pailleuse pour les travaux d’hygiène et d’alimentation. »

 

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