Cédric Subtil nourrit l’intégralité de son cheptel de 440 chèvres avec un aliment acheté auprès de la Sica Alicoop. Un choix revendiqué par cet éleveur qui s’affiche aux antipodes du dogme de l’autonomie alimentaire prôné par les organismes techniques. Alors, pourquoi miser sur ce type de ration ? Éléments de réponse grâce à cet exploitant installé depuis 2015 en hors-sol dans les Deux-Sèvres.
Parce que l’éleveur est gagnant en temps de travail
Le cheptel caprin de Cédric Subtil est nourri exclusivement à partir d’un aliment complet et fibreux fabriqué par Alicoop. Ce dernier se présente sous forme de cubes compactés, distribués à l’aide d’un godet. Baptisé Verdi Cub Total, cet aliment comprend tous les éléments de la ration journalière. Il couvre les besoins alimentaires des chèvres en lactation, notamment les besoins en UF (unité fourragère), en MAT (matière azotée totale) et en cellulose. Il apporte également la couverture recommandée en oligo et macro-éléments, ainsi qu’en vitamines essentielles. Enfin, sa présentation sous forme de cube répond aux contraintes comportementales des chèvres (tri des aliments) et aux contraintes anatomiques (ingestion, digestion, ..). Le Verdi Cub Total comprend à la fois les concentrés, le complément minéral vitaminique et les fibres. Sur l’exploitation de Cédric, chaque chèvre en production reçoit l’équivalent de 3,3 kg d’aliment. La nutrition du troupeau prend à peine 20 minutes de travail et il n’y a pas de refus à ramasser. La table d’alimentation est nettoyée deux fois par semaine. Au total, une journée de travail dure 6 h 30 avec 4 h 30 consacrées à la traite. La quantité de travail est bien sûr plus conséquente en période de mise bas. « Je voulais une organisation de travail simple à mettre en œuvre. Nous pouvons être remplacés facilement et prendre des vacances en étant sereins. Peu importe qui nous remplace, le travail reste simple à expliquer et à effectuer», poursuit Cédric.
Parce que la marge sur coût alimentaire est au rendez-vous
Dans un contexte politique et sociétal favorable à l’autonomie alimentaire, le choix technique de Cédric Subtil détonne. L’éleveur en a conscience mais reste convaincu de la pertinence de son choix. « J’invite les éleveurs a priori défavorables à ce choix technique de donner les résultats comptables de leur élevage, souligne-t-il. Pour ma part, je privilégie l’autonomie financière à la forme alimentaire ». Ses résultats comptables corroborent son appréciation. Ainsi, le coût alimentaire de l’exploitation atteint 0,88 €/chèvre/jour, en intégrant l’achat d’aliment distribué au tarissement. Quant à la marge sur coût alimentaire, elle s’affiche à 1,88 €/chèvre/jour. Il est vrai que si l’on regarde le coût alimentaire aux 1000 litres qui culmine à 714 €, l’approche de Cédric Subtil détonne. Ses résultats ont par ailleurs permis à l’éleveur de dégager, en 2017, un excédent brut d’exploitation (EBE) de 51 500 €, chiffre qui devrait passer à 75 000 € pour 2018. Comptant actuellement 440 chèvres, l’exploitant ambitionne d’agrandir son cheptel et de passer à 600 têtes. Ces résultats confirment pleinement Cédric Subtil dans sa fonction de chef d’exploitation agricole, lui qui à la base n’était pas issu du monde agricole. Après un long travail auprès des organismes financeurs, il a réussi le pari que représentait son installation.
De plus, cette approche de la nutrition présente un autre avantage. Elle permet de s’affranchir de matériel. Au final, le parc équipement de l’exploitant s’avère minimaliste : il comprend un tracteur, un godet et une pailleuse. Sur le plan économique, l’éleveur doit toutefois veiller à disposer d’une trésorerie suffisante pour payer la livraison de l’aliment, correspondant à une semi-remorque de 28 tonnes tous les 17 jours pour un coût de 304 €/tonne. « Pour la paille, dont les prix ne cessent de progresser, je n’ai plus besoin d’en acheter beaucoup. J’en utilise juste pour la litière. Et j’ai par ailleurs mis en place un échange paille contre fumier avec un voisin céréalier », précise également l’exploitant.
Parce que les chèvres améliorent leur production
Depuis la mise en place du Verdi Cub Total, l’éleveur a constaté une amélioration de la production de ses chèvres. Il a gagné 0,5 l/chèvre/jour. Son cheptel, composé à 50 % de primipares, affiche désormais un niveau de production à 1 120 litres/chèvre. Pour comparer, en 2015, avec une ration à base d’ensilage de maïs, la production plafonnait à 700 litres. Les taux actuels sont compris entre 36 et 37 g/l pour le TB et 34 g/l pour le TP. Au mois de mai, la production moyenne quotidienne atteignait 3,4 litres/chèvre. En décembre, elle est de 3,7 litres. Lors du tarissement, l’exploitant a recours à un aliment adapté aux besoins spécifiques de cette période charnière. Celui-ci a l’avantage d’offrir une présentation identique à l’aliment habituel et ne nécessite donc pas de période d’adaptation pour les animaux. Il contient notamment un minéral adapté.
Parce que la ration est sécurisée
Le Verdi Cub Total a été testé il y a plusieurs années par un institut de recherche. Il a été comparé à une ration classique dans laquelle la fibre de luzerne était apportée à l’auge. Les résultats de cet essai en caprins ont été mesurés et validés. Ils ont démontré que cet aliment favorise l’ingestion de 350 gr/jour en plus de fibres de luzerne. Le développement de ce produit a été assuré après un essai en élevage avec une conduite simultanée sur des lots comparables et un suivi technico-économique des performances. La formule et le concept ont été validés par des éleveurs et des conseillers. Après seulement six mois de commercialisation, huit éleveurs l’ont d’ores et déjà adopté.
Garanti sans OGM, le Verdi Cub Total contient plus de 20 ingrédients alimentaires et nutritionnels (tourteaux, céréales, fibres, graines de lin extrudées, premix), produits pour l’essentiel dans la région Poitou-Charentes. La coopérative Alicoop a présenté ce concept lors d’une journée portes ouvertes et n’a pas manqué de souligner que sa formule n’évolue pas dans le temps. Les éleveurs présents ont clairement indiqué leur intérêt et ont posé de nombreuses questions. Ils s’interrogent notamment sur la façon dont cette solution pouvait être perçue par le consommateur. Pour le spécialiste de l’alimentation animale, la question pour les éleveurs est de savoir s’ils peuvent mieux rémunérer leur travail en se plaçant dans une logique d’autonomie alimentaire ou en misant sur un fabricant d’aliments valorisant quasi exclusivement les matières premières produites à l’échelle de leur région. De son côté, Cédric Subtil a tranché.
E.L.D.
EN CHIFFRES
L’ÉLEVAGE DE CÉDRIC SUBTIL EN CHIFFRES
- 2 UTH. Cédric Subtil et sa femme ;
- un cheptel caprin de 440 Saanen :
- une moyenne de 1 120 litres de lait/chèvre/jour ;
- un EBE de 54 500 € ;
- une conduite d’élevage visant à obtenir une seule période de mise bas ;
- adhésion au contrôle laitier depuis mars 2017 ;
- recours à la monte naturelle et à l’insémination artificielle (objectif de 70 IA en 2019) ;
- vaccination contre la Fièvre Q, vaccin Vimco contre les mammites, vaccination contre les colibacilles.
- réalisation de cures hépato-protectrices et de cures de vitamines avant la période de saillies.