Une enquête pluriannuelle montre des bénéfices en termes de bilan azoté, d’impact environnemental et de bien-être des troupeaux.
Le programme MéthaLAE (1) a enquêté entre 2015 et 2018, dans neuf régions, 46 fermes liées à une unité, individuelle ou non, de méthanisation. Parmi elles, 19 élevaient des bovins laitiers (177 ha de SAU en moyenne) et 10 des bovins viande (141 ha). Question posée : la méthanisation peut-elle être un levier de l’agroécologie ? En réponse, l’enquête met en avant des « résultats globalement positifs » même s’il « ne faut pas conclure trop rapidement ». Extraits :
« Sur le panel d’exploitations enquêtées, la méthanisation n’a pas engendré d’augmentation de SAU supérieure à la moyenne nationale, ni de cheptel, ni de temps passé en bâtiments pour les animaux. »
« Le bilan azote est globalement amélioré avec une meilleure utilisation des ressources organiques locales et un moindre recours à une fertilisation azotée et potassique minérale. Mais, dans bon nombre de cas, l’utilisation du digestat peut être encore optimisée (période d’apprentissage et matériel de stockage ou d’épandage). »
« La méthanisation semble aussi favoriser le bien-être des troupeaux (meilleure qualité fourragère et meilleure autonomie alimentaire, diminution de certaines maladies). »
« Développer les CIVE et les méthaniser »
« L’impact environnemental est également positif, avec une meilleure efficacité énergétique des exploitations agricoles et un moindre impact en gaz à effet de serre. Une meilleure autonomie énergétique est globalement constatée, avec une baisse de la fertilisation minérale, un gain sur l’autonomie alimentaire et sur le recours aux énergies fossiles pour la production de chaleur. En revanche, certains postes, comme la consommation de fioul, sont parfois à la hausse, en lien, pour cet exemple, avec l’épandage du digestat ou la production de CIVE (2). Cet exemple illustre le fait que tous les paramètres ne peuvent pas s’améliorer en même temps. »
« Les économies de gaz à effet de serre sont principalement générées par la production d’énergie renouvelable et, dans une moindre mesure, par le stockage de carbone dans le sol, au travers de CIVE ou de prairies. D’ailleurs, si la filière souhaite maximiser son impact sur le climat, il faudra développer la culture des CIVE ET les méthaniser, mais il reste à voir l’impact de cette pratique sur le carbone labile (3) et la biologie du sol (hors champ d’investigation du programme). »
44 des 46 agriculteurs « ne regrettent pas leur choix »
« L’impact socio-économique est très variable selon le type de lien entre l’exploitation agricole, la méthanisation et le territoire. Selon les finalités recherchées par les porteurs de projet, ils devront s’orienter vers des modèles de méthanisation différents :
- pour un impact fort sur les revenus et/ou la transmission de l’exploitation, il faudra viser plutôt une unité de méthanisation individuelle ;
- pour un impact fort sur la logistique des matières et le dégagement de temps de travail, il faudra viser alors une unité de méthanisation collective. »
« Quel que soit le modèle choisi, 44 des 46 exploitations ne regrettent pas leur choix ; une s’interroge sur la reconduction d’un tel projet. Une majorité des agriculteurs trouve un regain d’intérêt dans le métier d’agriculteur : plus de technicité, plus de cohérence globale du système, meilleure intégration territoriale de l’exploitation agricole. »
Conclusion : « La méthanisation est bien un levier pour l’agroécologie, plus exactement elle peut parfaitement accompagner des trajectoires d’agriculteurs qui s’y engageraient, en prenant un minimum de points de vigilance, mais sans difficulté majeure, car elle présente des atouts intrinsèques tels qu’il faut vraiment être très malchanceux pour ne pas en bénéficier. »
BC
(1) MéthaLAE (Méthanisation, Levier de l’AgroEcologie ?) est un programme d’études CASDAR de 3 ans (2015-2018) coordonné par Solagro et associant de nombreux partenaires : Trame, Aile, la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, l’EPL du Périgord et Cerfrance.
(2) CIVE : cultures intermédiaires à vocation énergétique
(3) « Le carbone actif est la fraction active ou labile de la matière organique du sol. Cette fraction est rapidement dégradable et constitue une source de nourriture pour les microorganismes. » (source : AgroEnviroLab)
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