Les mesures de biosécurité ne sont pas obligatoires en caprin mais adopter quelques principes au quotidien permet de limiter les risques pathogènes. Le point avec Thierry Renaudineau, directeur technique au GDS(1) Vendée.
LE BÂTIMENT DES CHÈVRES DOIT ÊTRE DÉSINFECTÉ AU MOINS UNE FOIS PAR AN.
LE NETTOYAGE CONCERNE AUSSI LE MATÉRIEL D’ALLAITEMENT, DE SOIN, LES ABREUVOIRS AINSI QUE LE MATÉRIEL UTILISÉ EN COMMUN.
« DANS LES ÉLEVAGES, LA PRÉSENCE DE POINTS D’EAU, DE SAVON OU DE LAVE-BOTTE (PÉDILUVE) OU SURBOTTES N’EST PAS SYSTÉMATIQUE. OR, L’HYGIÈNE DES MAINS ET DES BOTTES EST INDISPENSABLE »
« Tout animal bien nourri et bien soigné sera plus résistant »
La biosécurité regroupe un ensemble de mesures visant à protéger l’élevage des agents pathogènes, à prévenir leur propagation en son sein, leur dissémination à l’extérieur, ainsi que toute transmission à l’Homme. « Beaucoup d’éleveurs pratiquent déjà ces gestes de biosécurité sans nécessairement les désigner ainsi », souligne Thierry Renaudineau, du Groupe de défense sanitaire (GDS) vendéen. Cependant, entre octobre 2022 et avril 2023, l’autoévaluation(1) de 28 élevages caprins a permis d’identifier quelques failles. « Le gros point faible est l’absence de prélèvements pour vérifier la situation sanitaire des animaux introduits sur l’élevage. Il reste aussi des marges de progrès sur la gestion des intervenants qui entrent et circulent sur la ferme ». Les troubles sanitaires ont un coût et l’émergence de maladies contagieuses liée au changement climatique fait peser des risques sur les élevages, quelle que soit leur spécialité. « Il faut donc empêcher l’entrée et la sortie des agents pathogènes ».
NE PAS FAIRE ENTRER LA MALADIE DANS LE TROUPEAU
ou// La bonne santé du troupeau
La gestion du troupeau est le poste le plus sensible. « Des animaux en bonne santé, bien nourris et bien logés seront davantage capables de faire face au microbisme présent dans l’élevage ». Le bon réflexe commence par l’observation pour « repérer les animaux qui s’isolent ou ne mangent pas. Plus on intervient rapidement, plus on augmente les chances de guérison et plus on réduit le risque de contagion ». L’animal malade doit être isolé du reste du troupeau. « Les élevages disposant rarement d’une infirmerie, il faut trouver un lieu facile à désinfecter et se protéger avec des gants ». Le stress affaiblit le système immunitaire. « Il faut être attentif à tout épisode susceptible de générer du stress pour les animaux : notamment la séparation mère-chevreau, le transport ». Pour ne pas faire rentrer la maladie dans le troupeau, Thierry Renaudineau rappelle l’importance de la prévention médicale (vaccination) et des précautions d’hygiène (rester vigilant quant à l’infection des mamelles, disposer d’un lieu propre pour la mise bas, pratiquer le retrait systématique des placentas.). La qualité de l’eau se vérifie une fois par an et les abreuvoirs doivent être lavés régulièrement. « La bactérie de la paratuberculose peut survivre 18 mois dans l’eau ».
L’ACHAT D’ANIMAUX
Limiter l’entrée des pathogènes sur la ferme, c’est veiller au statut sanitaire des animaux achetés. « Il est préférable de limiter le nombre de fournisseurs et de privilégier de jeunes animaux ». Le GDS conseille de visiter « si possible » l’élevage du fournisseur et d’effectuer des prélèvements sanguins sur un échantillon « chez l’acheteur et chez le vendeur » afin de rechercher des traces éventuelles d’anticorps produits en réponse à l’infection. Le véhicule de transport doit être propre et désinfecté. Une fois sur l’exploitation, les animaux achetés doivent être mis en quarantaine. « Ils peuvent être porteurs sains. Le stress du transport peut révéler des pathologies ». Pour éviter tout risque de contamination avec le reste du troupeau, l’éleveur doit utiliser un matériel spécifique à la quarantaine et respecter des mesures d’hygiène.
DIMINUER LA CHARGE MICROBIENNE
À l’intérieur comme à l’extérieur de l’élevage, il faut chercher à réduire la charge microbienne. Les effluents d’élevage peuvent être porteurs de germes et « doivent être stockés à l’écart des visiteurs, des parcours d’animaux et loin des points d’eau ». L’épandage peut aussi être une source de dissémination. « Sur pâture et par temps calme, on maîtrise le risque. Sur une prairie fauchée, c’est moins facile, mais ce n’est pas encore trop impactant. Mais sur une prairie pâturée, on prend des risques notamment avec les jeunes animaux ». L’épandage et le curage des bâtiments sont déconseillés pendant l’accueil du public. Enfin, il faut bannir les visiteurs lors d’épisodes sanitaires critiques.
NATHALIE BARBE
- GDS France, grille d’autoévaluation des mesures de biosécurité en élevage https://www.gdsfrance.org.
SECTORISER L’EXPLOITATION
Un plan de biosécurité vise à limiter la circulation des germes au sein de l’exploitation. Selon la configuration des lieux, il n’est pas toujours évident à mettre en œuvre. L’objectif cependant, est d’obtenir un découpage en trois zones, et de mettre en place une signalétique adaptée : zone publique (parking visiteur, aire d’équarrissage éloignée le plus possible des bâtiments), zone professionnelle (livreur, collecteur, etc.) et élevage (bâtiments, parcs, pâtures). « Pour chacune de ces zones, il faut éviter les croisements notamment avec les passages d’animaux », prévient Thierry Renaudineau.
LA LOI DE SANTÉ ANIMALE (LSA)
Depuis 2021, la loi européenne de santé animale réglemente les obligations de prévention, surveillance et d’éradication des maladies animales transmissibles. Parmi les 63 maladies répertoriées et classées selon leur dangerosité, 17 concernent l’élevage caprin. Une simple déclaration est obligatoire pour la paratuberculose ou la fièvre Q. Pour la MHE(1) et la tuberculose s’ajoute une certification aux échanges. La fièvre catarrhale peut faire l’objet d’un plan d’éradication national. « C’est au libre choix des pays, l’Union européenne n’impose rien », précise Thierry Renaudineau, du GDS Vendée. Le plan d’éradication est obligatoire pour la brucellose et la rage (avec déclaration et certification aux échanges obligatoires). « Absentes du territoire européen », les maladies les plus dangereuses comme la variole caprine nécessitent un plan d’éradication immédiat.
- MHE : maladie hémorragique épizootique
AVORTEMENTS : LA RÈGLE EN CAPRIN
En élevage caprin, le recours au vétérinaire est obligatoire « si on observe au moins trois avortements en une semaine ». Dans ce cas, « il faut isoler la porteuse, faire une recherche de brucellose et d’autres agents infectieux comme la toxoplasmose, la fièvre Q ou la chlamydiose ». Des prélèvements sanguins sont effectués sur les avorteuses et les avortons, mais aussi sur dix congénères(1). « La présence de la fièvre Q sur une avorteuse ne suffit pas à dire que cette pathologie est à l’origine des avortements. Si cinq ou six congénères présentent des anticorps, il est fort probable que le germe circule ».
(1) Protocole national (OSCAR) – Observatoire et suivi des causes d’avortements chez les ruminants