Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture, a présenté, le 25 juin, le programme Ambition Bio 2022. « Où sont les 1,1 milliard d’euros promis ? », a aussitôt réagi la FNAB.
« Le bio correspond à la fois à une forte demande des Français à laquelle nous devons répondre et à une opportunité pour les agriculteurs. Il faut que tous les consommateurs aient accès au bio et que les agriculteurs y voient de nouveaux débouchés commerciaux. Faire venir de l’étranger des produits bio qu’on pourrait produire ici est un non-sens environnemental et une perte de recette financière. Nous allons faciliter le déclic de la conversion, notamment en nous appuyant sur les collectivités locales et sur les projets alimentaires territoriaux », commente Stéphane Travert (photo ci-contre) dans un communiqué.
Selon le ministère de l’agriculture, le programme Ambition Bio 2022 est doté de 1,1 milliard d’euros et s’articule en sept axes majeurs (1), financés principalement via trois leviers :
– le renforcement des moyens consacrés aux aides à la conversion : 200 millions d’euros de crédits d’Etat, 630 millions d’euros de fonds européens FEADER auxquels s’ajouteront les autres financements publics, et, à compter de 2020, un apport de 50 millions d’euros par an par la redevance pour pollutions diffuses (RPD) ;
– un doublement du fonds de structuration « Avenir Bio » géré par l’Agence Bio, porté progressivement de 4 à 8 millions d’euros par an ;
– une prolongation et une revalorisation du crédit d’impôt bio de 2 500 à 3 500 euros jusqu’en 2020, inscrite en loi de finances 2018.
« Un plan ambitieux sans argent » (FNAB)
« Pas de surprises pour ce texte », commente la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB), qui indique avoir « participé à sa construction et apprécié la qualité des échanges avec les services du ministère. Mais le contenu ne suffit pas à redonner confiance là où, sur le terrain, le désengagement de l’Etat reste palpable. Depuis des mois, nous voguons d’annonce en promesse, de promesse en déception ». Pourtant, selon la FNAB, la réalité des producteurs reste la même :
- Les aides 2016 n’ont toujours pas été versées malgré un calendrier déjà repoussé deux fois,
- Les aides au maintien n’ont pas été rétablies malgré la promesse présidentielle de 200 millions d’euros pour soutenir les services environnementaux rendus par l’agriculture,
- Les caisses des Régions pour payer les aides à la conversion n’ont pas été renflouées à la hauteur des enjeux,
- Les crédits animation Bio pour le développement sont toujours plus contraints.
« On nous promet 630 millions d’euros de fonds européens d’ici 2022 alors que le ministre Stéphane Travert vient d’exclure, lors du Grand Conseil d’Orientation de l’Agence Bio tout nouveau transfert entre les piliers 1 et 2 et que toutes nos questions sur la provenance de ces fonds sont restées sans réponse depuis deux mois. La FNAB craint que le ministère repousse sur la prochaine Pac cet engagement alors que nous avons peu d’espoir qu’elle voie le jour avant 2022, ou réduise les plafonds à peau de chagrin. »
« Ces derniers mois, poursuit la Fnab, seulement 45 millions d’euros de fonds européens ont été fléchés pour répondre aux besoins de financement des aides bio d’ici la prochaine Pac. Pour atteindre l’objectif de 15 % de SAU bio en 2022, la seule conversion nécessiterait au minimum 400 millions d’euros pour les trois prochaines années. A l’heure actuelle, 6 régions (Bretagne, Pays de la Loire, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Centre-Val de Loire, Auvergne-Rhône-Alpes) ont déjà consommé l’ensemble de l’enveloppe disponible jusqu’à 2020 ».
« Un grand plan national sans budget à la hauteur des enjeux ne sera qu’un miroir aux alouettes qui permettra au gouvernement de surfer sur une vague qu’il n’a ni créée ni même entretenue. L’écart qui se creuse entre le terrain et Paris, entre les régions et le gouvernement, n’est pas pour nous rassurer alors que s’ouvre la discussion sur la prochaine Pac », conclut Guillaume Riou, président de la Fnab, dans un communiqué.
BC
(1) Les 7 axes annoncés : Développer la production pour atteindre les 15% de surface agricole française cultivée en bio à l’horizon de 2022 (un objectif issu des Etats généraux de l’alimentation) ; Structurer les filières via le « Fonds avenir bio » ; Développer la consommation et accompagner l’offre de produits biologiques ; Redéfinir les priorités en matière de recherche ; Former les acteurs ; Adapter la réglementation ; Le bio dans les territoires d’outre-mer.